
Biennale Europe-Afrique Montpellier, carrefour des mémoires

Biennale-Europe
MONTPELLIER, CARREFOUR DES MÉMOIRES : QUAND L’AFRIQUE PARLE SANS TRADUCTEUR
Du 6 au 12 octobre 2025, à Montpellier, s’est ouverte la Biennale Europe-Afrique, carrefour inédit où se croisent diplomates, artistes, penseurs, diasporas et voix citoyennes. Un rendez-vous annoncé comme dialogue, mais ressenti comme un moment de vérité. Ici, l’Afrique n’est plus invitée. Elle est venue avec sa chaise, son tambour, ses plaies et ses promesses.
Un espace de parole, ou le nouveau théâtre des silences ?
À Montpellier, le décor est poli, les discours bien tenus. Mais dans les couloirs, les visages africains racontent autre chose : la fatigue des invitations sans décisions, le refus du paternalisme poli. « Coopération », répètent certains. « Justice », rétorquent d’autres. Car la jeunesse africaine ne réclame plus des bourses, mais des clés – celles de la scène mondiale, de l’économie, du récit.
La culture, ce langage sans visa
Ce fut le moment le plus fort : quand les artistes ont pris la parole. Musiciens, cinéastes, slameurs, philosophes… Tous portaient la même exigence : cesser d’être des objets d’étude pour devenir des auteurs d’Histoire. Ils ont dit l’exil, la fierté, les racines, la déchirure. L’Europe a ouvert la salle, mais c’est l’Afrique qui a ouvert le cœur.
« Nos tambours ne demandent pas de micro. Ils demandent qu’on écoute. »
Diaspora : ni nostalgique, ni assistée, mais architecte
Les jeunes présents à Montpellier portaient deux identités, sans excuses. Français et Ivoiriens, Burkinabè et Belges, Sénégalais et Italiens. Ils veulent bâtir des ponts, pas remplir des formulaires. Ils ne cherchent pas à rentrer ou rester. Ils veulent circuler, transmettre, inventer. Leur Afrique est globale, mobile, plurielle. Et leur Europe n’est plus coloniale, mais à convaincre.
L’économie, l’angle mort de la fraternité
On a parlé de culture, beaucoup. D’espoir, passionnément. Mais derrière les sourires, une grande question demeure : qui décide ? Les capitales européennes ouvrent les portes, mais verrouillent les marchés. L’Afrique exporte ses talents, mais importe ses défaites. Et si le véritable partenariat commençait par le partage des gains, pas des slogans ?
Montpellier n’était pas une fin, mais un commencement
Au fond, cette Biennale ne changera pas le monde. Mais elle aura planté une phrase dans l’air : l’Afrique n’est plus un dossier, elle est un présent. Ceux qui ont parlé n’ont pas demandé d’aide – ils ont proposé une alliance, d’égale à égale. Et quelque part, entre deux applaudissements, un vieil équilibre s’est fissuré.
Montpellier n’a pas vu une Afrique suppliante. Elle a vu une Afrique en marche, qui apporte ses mythes, ses langues, ses colères et ses visions. Une Afrique qui n’attend plus de reconnaissance, mais prépare sa victoire.
Ici, nous n’avons rien à demander. Nous venons avec ce que nous sommes. Ça n’engage que nous.
Edition -
13 octobre 2025


